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1 novembre 2004 1 01 /11 /novembre /2004 10:58

PRINCIPES DE LA SCIENCE SOCIALE
PAR M. H.-C. CAREY (De Philadelphie)

 

henry_charles_carey.jpg


TRADUITS EN FRANÇAIS PAR MM. SAINT-GERMAIN-LEDUC ET AUG. PLANCHE

1861

 

 

 

 

 

 

CHAPITRE XIV :

CONTINUATION DU MÊME SUJET.

 

    § 2. — Résultats funestes de la nécessité croissante d'avoir recours aux services du trafiquant.


    Pour que l'homme acquière du pouvoir sur la nature, il est indispensable que le marché destiné à son travail et aux produits de ce travail soit rapproché de lui. Lorsque ce marché est éloigné, quelque parfaits que puissent être les moyens de transport, l'engrais ne peut être restitué à la terre, et si la puissance productrice de celle-ci n'est pas entretenue, l'homme et la terre doivent s'appauvrir à la fois, en même temps qu'il y a diminution constante dans la possibilité d'entretenir le commerce. Les facilités de transport dans toute l'étendue de l'Irlande avaient été considérablement augmentées dans le demi-siècle qui vient de s'écouler ; mais à chaque phase de progrès, les famines et les pestes furent à la fois plus fréquentes et plus cruelles, jusqu'à ce qu'enfin l'achèvement d'un réseau étendu de chemins de fer fut signalé par un de ces fléaux, sévissant avec une intensité qui dépassa de beaucoup toutes les épidémies antérieures. A chacune de ces phases la puissance d'association diminua, le sol s'appauvrit plus rapidement ; et maintenant ceux qui le cultivaient abandonnent partout les demeures qui ont abrité leur jeunesse ; partout ses propriétaires sont dépossédés ; et ses hommes d'intelligence ont presque entièrement disparu.

    Les chemins de fer sont construits maintenant pour et non par la population de l'Inde, mais leurs résultats doivent inévitablement être les mêmes que ceux observés en Irlande. Le but en vue duquel ils sont faits, c'est de développer davantage l'exportation des produits bruts du sol, et d'étendre encore la puissance centralisatrice du trafic ; ce qui doit amener un épuisement plus considérable du sol, la diminution de la puissance d'association parmi ceux qui l'occupent, et la décadence plus rapide de commerce. Le peu qui subsiste encore des manufactures de l'Inde, doit bientôt disparaître, et le coton doit être, de plus en plus forcé de se frayer sa voie, en abandonnant l'individu qui le produit au coeur de l'Inde, pour arriver au voisin immédiat du producteur, — et même à sa propre femme et à ses enfants , — par la route, faisant de nombreux circuits, de Calcutta, de Bombay et de Manchester ; système qui entraîne l'emploi des boeufs, des chariots, des navires et des wagons de chemins de fer, avec une augmentation constante dans la part proportionnelle du travail de la société nécessaire pour effectuer les changements de lieu, et la diminution de celle que l'on peut consacrer à accroître la quantité de produits susceptibles d'être transformés ou échangés. Plus on fera de chemins de fer dans l'Inde, plus sera faible la demande de travail et moins sera élevé le prix du coton (1). Plus se développera la tendance des Indiens à abandonner leurs femmes et leurs enfants et à émigrer sur les plantations sucrières de l'île Maurice pour y chercher des moyens d'existence, plus doit diminuer la puissance d'association et moins doit être prononcée la tendance au développement de l'individualité au sein de la population.

    Le Mexique a décliné constamment depuis le moment où le trafic avec ce pays est devenu plus libre pour le monde. Si nous voulons trouver la cause de sa décadence et de sa dissolution imminente, nous devons la chercher dans ce fait, que ses manufactures ont presque complètement cessé d'exister, que l'individualité s'est amoindrie et que le trafic a remplacé le commerce. Dans l'Amérique espagnole, en général, les mêmes phénomènes se sont présentés, le travail exigé pour le transport augmentant dans une proportion constante, et le travail consacré à la production diminuant, avec une diminution constante dans la puissance productrice du sol pour récompenser le travail, et diminution dans le pouvoir de l'individu pour soumettre à la culture les terrains plus riches. L'Italie, la Grèce, l'Afrique, le Brésil et les îles si fertiles de l'Océan Indien sont placés dans une situation analogue, faisant peu de commerce entre eux et forcés de dépendre presque exclusivement du trafic avec des pays éloignés. Les souffrances de la population des îles Ioniennes sont aussi fréquentes que les famines chez les habitants de Madère ; et par la raison, que ces individus étant forcés de dépendre exclusivement de l'agriculture, il y a nécessairement une déperdition incessante de capital.

    Plus la puissance pour le bien est considérable, plus elle l'est aussi pour le mal. Les poisons les plus énergiques constituent les remèdes les plus actifs ; et les individus que leurs facultés rendent le plus propres à devenir les bienfaiteurs de l'espèce humaine sont précisément ceux qui sont le plus funestes à la société, lorsqu'ils ont des dispositions vicieuses. La vapeur et la poudre à canon, employées à propos, offrent à l'homme des avantages inappréciables ; mais dans le cas contraire, leur puissance pour faire le mal est en raison de leur puissance de rendre service. Il en est de même à l'égard du corps humain et de son alimentation ; la nourriture qui est susceptible, dans un certain état de l'organisation, de produire la plus grande somme de force, est précisément celle qui, dans un certain autre, tend le plus à détruire la force et à anéantir la vie. Il en est de même à l'égard des routes et des autres améliorations. Pour une société excellemment organisée, — une société où existe à un haut degré la diversité des travaux, et dont le commerce, en conséquence, est considérable — toute route nouvelle amène avec elle l'accroissement de l'empire sur la nature ; tandis que pour celle où l'organisation n'existe que dans de faibles proportions, la construction de chaque route ne peut que fournir un nouveau moyen d'épuisement, au moyen duquel le sang même qui entretient sa vie peut plus facilement lui être enlevée, ainsi que nous l'avons vu à l'égard de l'Irlande. Le trafic a été « le fléau de la Polynésie ; » et plus sa puissance devient considérable aujourd'hui, plus devient rapide le progrès de ses effets funestes parmi la population des îles. Le trafic a été le fléau de l'Afrique septentrionale et occidentale ; et les Hottentots disparaissent du globe à mesure qu'augmente la facilité des relations avec les étrangers. Le trafic fait disparaître les aborigènes de l'Ouest et il produira à l'égard des Japonais, lorsqu'une fois il aura été introduit parmi eux, précisément le même résultat qu'il a déjà produit à l'égard de la population des Iles Sandwich et de celle de l'Inde.

    Si les choses se passent ainsi, il faut l'attribuer uniquement à ce fait, que les sociétés en sont encore à connaître et à apprécier l'avantage qu'elles recueilleraient, en pratiquant dans leurs relations avec d'autres sociétés plus faibles, cette grande loi qui prescrit à l'homme de faire à autrui ce qu'il voudrait qu'on lui fît lui-même. En politique, la moralité est inconnue ; et il suit de là, comme conséquence nécessaire, que le bien important et durable est constamment sacrifié à un profit insignifiant et temporaire ; les nations étant partout dirigées dans leur conduite par des motifs exactement semblables à ceux qui, si souvent, poussent l'individu à gagner une place dans la prison pénitentiaire en volant dans la poche de son voisin, lorsqu'en suivant une conduite différente il pourrait sans peine se mettre dans une situation d'aisance et de bien-être permanents (2).

    Si la population africaine eût été instruite dans les véritables voies de la civilisation, si elle eût appris, conformément au conseil d'Adam Smith, à rassembler ses matières premières et à les rendre ainsi propres à être transportées au loin, elle pourrait, aujourd'hui, avoir de nouvelles routes et serait préparée à approvisionner l'Europe, dans une proportion presque illimitée, des productions des tropiques, tandis qu'elle-même aurait fait de rapides progrès, sous le rapport du développement de ses diverses facultés. Si l'on eût laissé les Irlandais, les Turcs et les Portugais, acquérir et développer l'industrie manufacturière, aujourd'hui ils augmenteraient considérablement le fonds de matières premières nécessaires à l'approvisionnement du monde, et le commerce avec ces peuples aurait acquis une grande importance. S'il est devenu tout à fait nul, cela tient à ce fait, qu'ils ont été contraints d'entretenir des relations commerciales sur le pied de liberté, avec des sociétés jouissant d'une organisation plus avancée que la leur, puissantes pour le bien et le mal, et employant leur puissance comme un moyen de s'assurer des profits pour elles-mêmes. Cherchant toujours le bien présent et momentané, en même temps qu'elles n'avaient nul souci du dommage futur et durable, ces dernières ont cherché à se fortifier en affaiblissant toutes celles qui les environnaient. Agir ainsi avec intention serait un crime ; mais, comme résultat de l'ignorance des vrais principes de la science sociale, çà été « une faute, » et conséquemment, suivant le jugement énoncé par Talleyrand, on devrait le considérer comme étant même pire qu'un crime.

 

 

 


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